pneus caoutchouc Roll Gom
Faire roues des pneus usagés
Posté par : Martine Chartier 28.02.2024 à 16h30
Croule, et depuis bien des années maintenant ! La société Roll Gom est l’émanation d’un petit groupe français : M.P.R. comme manufacture parisienne de roulettes, créée en 1937. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le créateur et propriétaire de la société, Paul Flétout, a été sollicité pour réparer et surtout pour fabriquer des roues, essentiellement destinées aux brouettes, diables, chariots et bétonnières. « Comme il n’y avait pas de caoutchouc disponible sur le marché, car les bateaux étaient plus souvent coulés que parvenus aux ports, rappelle Richard Lett, président de Roll Gom. Il a fait partie des dix personnes qui ont pensé à utiliser le pneu usagé pour en faire des bandes de roulement. » Une dizaine de sociétés comme celle-là ont fonctionné en Europe jusque dans les années 1990-2000.
C’est dans son petit atelier parisien que le créateur démarre son activité. Devenu trop petit, l’entreprise s’implante à Crisolles, dans l’Oise. Paul Flétout y installe une usine, plusieurs fois agrandie, développée et modernisée, qui a compté jusqu’à 600 collaborateurs.
« A un moment, le marché étant devenu un peu plus compliqué, alors que le site faisait de la régénération de la poudre de caoutchouc provenant de pneus usagés et de caoutchouc vierge, il a dû faire un choix. Il n’a conservé que la production à partir de pneus usagés pour équiper les engins de manutention. » Un incendie détruit la partie caoutchouc. Le gendre du créateur, devenu propriétaire à son tour de la société, décide de délocaliser cette production à proximité d’un réseau autoroutier, plus facile d’accès. La zone industrielle de Tilloy-lès-Mofflaines, dans la communauté urbaine en création d’Arras (Pas-de-Calais), est retenue. La société Roll Gom est créée sous ce nom en 1984. Cette année-là, Richard Lett, ancien professeur d’allemand, change de trajectoire professionnelle et rejoint la société. « Nous étions au milieu des champs. J’ai vu cette usine se monter, se développer et s’agrandir. » Roll Gom entre dans le groupe Auréa, présidé par Joël Picard, en 2006.
30.000 t de pneus usagés
La société est installée sur un site classé ICPE de 35.000 m², dont 5.000 m² sont couverts. Elle travaille en feu continu par équipe de 5/8, soit 24 heures sur 24 et 7 jours par semaine, entre 330 et 360 jours par an. « C’est une petite entité, précise son dirigeant, nous sommes entre 85 et 100 personnes avec les intérimaires et un staff administratif de moins d’une douzaine. Nous n’éteignons pas les fours sauf pour les opérations de maintenance en été. Il y a quelques décennies, nous achetions de la poudre de caoutchouc sur le marché pour la fabrication de nos roues. Nous avons ensuite fait l’acquisition successive de deux broyeurs. L’entreprise a ainsi pu acheter directement des morceaux de caoutchouc provenant de pneumatiques déchiquetés. » Un déchiqueteur est venu compléter l’installation. « Nous partons dorénavant du pneu entier de véhicules légers en fin de vie jusqu’à la production de poudre »
La société réalise un chiffre d’affaires compris entre 15 et 16 M€/an. Ce sont quelque 30.000 t de pneus usagés qui entrent sur le site chaque année (10 % des pneus usagés en France) pour assurer une production comprise entre 10 et 15 millions de roues par an. Roll Gom s’approvisionne auprès des éco-organismes FRP et Tyval. La taille des roues produites est comprise entre 160/200 mm pour les plus petites, et jusqu’à 500 mm pour les plus grandes. « Nous réalisons nos propres jantes en plastique, toujours en matière recyclée (PEHD et PP) grâce à cinq presses à injecter. » Le marché le plus important est constitué des roues destinées aux conteneurs à déchets. Moins important en volume, mais avec de meilleures marges : le marché des roues des nettoyeurs haute pression de la société Kärcher, en Allemagne et en France. « Le client avec lequel nous avons une exclusivité depuis 1984. » La société équipe bétonnières, brouettes, extincteurs, chariots et diables… tout type de produit qui utilise des roues avec bandage caoutchouc noir en usage extérieur et se déplace à la vitesse de l’homme.
La conception des moules et des prototypes est assurée par le bureau d’étude en interne, afin de répondre à la demande du client. « Nous allons recevoir très prochainement une machine destinée à automatiser le montage des bandes de roulement sur les jantes de plus grande taille, en complément de celle destinée aux plus petites tailles », indique Richard Lett.
Le recyclage d’un pneu permet la valorisation de différents matériaux, le caoutchouc mais également la ferraille et les fibres textiles. Tout est bon dans le pneu !
Martine Chartier